Forum de la Gouvernance de l'Internet : intervention de Nicolas Chagny, lors de la plénière d'ouverture

Bertrand de la Chapelle : Dans quelle mesure est-il adapté / transposable au traitement d'enjeux plus politiques : liberté d'expression, protection de la vie privée, cybercriminalité, etc ... doit-il fonctionner légèrement différemment en ces matières ?​
 
Nicolas Chagny : Vous le savez, les discussions et décisions multi-parties prenantes ("multistakeholders") sont dans l'ADN même de l'Internet Society et fonctionnent parfaitement avec la communauté technique Internet, l'IETF est un modèle en la matière.
 
Je ne peux clairement pas me demander si ce type d'organisation peut réussir pour autre chose que pour la technique, je dois plutôt dire que nous devons réussir, car c'est la clef de succès d'Internet aujourd’hui. Mathieu Weil a exposé les enjeux et l'avancement de la transition IANA. En tant que telle, cette transition est un exemple d'organisation multi-partie prenante, à la fois dans le mode de discussion et dans les enjeux du futur mode d'organisation de la fonction IANA. Mais aussi pour le contrôle dans le temps de cette fonction cruciale du réseau.
 
Aujourd'hui, Internet est un bien commun de l'humanité, une sorte de pré-requis. Quand on s'installe dans un appartement, on s'occupe de son électricité et d'Internet. L'enjeu de notre communauté est de faire que cela soit vraiment vrai, sans rupture entre états, sans rupture entre la ville et la campagne, sans rupture en fonction du terminal. Avec une continuité dans tous le pays, voire dans les transports ! L'enjeu, et je citerai Fadi Chehadé, le Président de l'ICANN, c'est de n'avoir qu'un seul Internet dans le monde. Le risque c'est d'en avoir plusieurs. C'est un risque pour les utilisateurs. Mais c'est aussi un risque pour les entreprises et leurs enjeux business.
 
Je tiens à souligner l'initiative portée par la France avec la grande concertation sur le numérique. Les acteurs ont été nombreux à contribuer, les contributions sont variées, riches et très fouillées. J'espère et j'ai confiance pour que les services pilotés par Axelle Lemaire transposent ces bonnes idées dans la future Loi sur le numérique. Cette concertation est un premier pas vers l'instauration de modes de dicussions multi-parties prenantes pour le Numérique en France. Et j'ai entendu tout à l'heure le souhait de Mme la Ministre de proposer le projet de loi à la communauté Internet avant le Conseil d'Etat.
 
Alors oui, nous devons faire que les discussions multi-parties prenantes soient la norme, pour tout ce qui attrait à Internet, et au-delà des aspects techniques.
 
Pour que cela fonctionne, il faut :
- un cadre clair, avec un objectif précis de décision ;
- un timing clair ;
- un véritable mandat.
 
 
Bertrand de la Chapelle : En particulier, l'ISOC a récemment pris position en faveur d'un traitement des enjeux de sécurité de manière plus ouverte et non réservée aux seuls gouvernements. Comment faire ? Est-ce possible ?​
 
Nicolas Chagny : Nous avons publié en avril un document sur la « sécurité collaborative », c’est une initiative pilotée par Olaf Kolkman, CTO de l’Internet Society. Sur la sécurité, il s’agit de prendre en compte le fait qu’on ne peut plus dire qu’on ne savait pas. Et il s’agit d’aborder la sécurité sur le plan international.
 
Il y a cinq approches clefs dans ce document :
- Favoriser la confiance des utilisateurs, afin d’assurer qu’Internet est un moteur de l'innovation économique et sociale ;
- La notion de responsabilité collective : l’idée est là de sensibiliser tous les acteurs d’Internet, de l’utilisateur final avec sa box à l’hébergeur et à l’opérateur, chacun devant comprendre ses responsabilités dans la sécurité ;
- Le respect des droits fondamentaux : les solutions de sécurité doivent être compatibles avec les droits humains fondamentaux et de préserver les propriétés fondamentales de l’Internet ;
- Le consensus : la sécurité ne peut être efficace que si elle repose sur des étapes évolutives agiles basées sur l'expertise d'un large éventail de parties prenantes ;
- Et enfin, la notion de « Penser globalement, agir localement », c’est la démarche bottom-up que l’on souhaite appliquer au sein de l’Internet Society dans tous les domaines.
 
Un regret simplement puisque l’on parle de Sécurité, je voulais dire deux mots sur ce projet de Loi sur le Renseignement dont on parlait à l'instant et qui entre en débat au Sénat. J'ai signé ce matin dans le Plus du Nouvel Obs une lettre ouverte aux Sénateurs qui leur conseille de rendre les boîtes noire transparentes.
Et je vous garantis que la date du 2 juin pour ce FGI est choisie depuis bien longtemps.
Sur ce projet de Loi, je pense que nous aurions pu prendre un temps de concertation multi-acteurs, cela aurait d'ailleurs été dans la lignée du rassemblement unanime qui a suivi les attentats du 11 janvier à Paris.
Personne ne souhaite d'attentats, aucun hébergeur français ne souhaite héberger des organisations terroristes et aucun acteur du numérique ne s'oppose à ce que la sécurité des français soit accrue.
Par contre, les utilisateurs, particuliers et entreprises, veulent avoir confiance en leur partenaire technique, la confiance passe par le respect des libertés et par les mécanismes de contrôle que l'on met en place sur la surveillance pour assurer ces libertés. C'est une occasion manquée de renforcer cette confiance. C'est aussi un mauvais signal aux pays qui n'ont pas les mêmes valeurs de libertés que nous et qui vont nous prendre en exemple, mais dans le mauvais sens. 

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